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Baladodiffusion : Les voix du terrain 001 - Nehiyawak Land and Language Camp

juin 2017

Un séries baladodiffusion : Les voix du terrain
Un séries baladodiffusion :
Les voix du terrain

Les voix du terrain

Bienvenue aux Les voix du terrain, un balado produit par le Centre de la collaboration nationale de la santé autochtone (CCNSA) qui met l’accent sur la recherche innovante et les initiatives communautaires promouvant la santé et le bien-être des peuples des Premières Nations, des Inuits et des Métis au Canada.

Épisode 1 : Le camp Nehiyawak - Site et langue parlée au camp: Revitalisation des langues autochtones en vue d’une bonne santé et d’un meilleur bien-être

Le présent épisode se penche sur le site et la langue parlée au camp Nehiyawak (AN), un programme d’immersion d’une durée d’une semaine sur un territoire cri en Saskatchewan. Le camp a été mis en place par Belinda Daniels, érudite crie et apprenante en langue seconde. Pour la douzième année consécutive, le camp d’été est organisé au sein de différentes collectivités des Premières Nations d’un bout à l’autre de la Saskatchewan. Dans le présent balado, vous entendrez parler de l’importance de revitaliser la langue pour le bien-être mental et spirituel des peuples et des communautés autochtones.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur le site du camp Nehiyawak et la langue parlée au camp, nous vous invitons à lire la fiche d’information du Centre de la collaboration nationale de la santé autochtone : La culture et la langue, déterminants sociaux de la santé des Premières Nations, des Inuits et des Métis, à ou à communiquer avec Belinda Daniels..

 

Écoutez sur SoundCloud (en anglais)

 


 

Belinda Daniels
Belinda Daniels - Le camp Nehiyawak

Bio

Belinda (kakiyosew) Daniels est la fondatrice du camp d’été en langue nēhiyawak, qui existe depuis 12 ans; son rôle consiste à former des enseignants de cri langue seconde qui travaillent auprès des Premières Nations établies dans différentes réserves de la Saskatchewan. Belinda s’est vu accorder le Prix attribué à la meilleure enseignante autochtone canadienne en 2015 pour son travail dans le développement langagier et elle était l’une des finalistes du Global Teacher Prize 2016. Belinda est en ce moment candidate au doctorat à l’Université de la Saskatchewan en Alberta et siège en qualité de bénévole à plusieurs conseils d’administration, dont ceux de Centraide, de la Dr. Stirling McDowell Foundation et d’Indspire.

Transcription

Je m’appelle Belinda Daniels. J’appartiens à la Première Nation de Sturgeon Lake. J’enseigne la langue crie depuis plus d’une décennie. C’est en l’enseignant que je l’ai moi-même apprise, par le biais des camps linguistiques, une initiative locale en marche vers sa treizième année. Le camp en langue crie vient d’une idée qui a pris forme au cours de mon projet de maîtrise. Je m’interrogeais alors sur ce que cela signifie que de parler la langue Nehiyawdu point de vue de la nation crie? La seule façon d’obtenir la réponse était d’examiner ce que mes ancêtres et mes grands-parents avaient fait : pratiquer cette langue sur le territoire cri. Je n’avais vraiment aucune connaissance de la langue. Je comprenais que mes grands-parents s’adressaient à moi ou parlaient de moi quand ils prononçaient le mot nosîm, ce qui signifie petit-enfant et c’est à peu près tout ce que j’étais alors en mesure de comprendre.

Je suis maintenant responsable d’une imposante cohorte formée d’enseignants, de professeurs de langues, même d’artistes que j’attire pendant 4 à 5 jours et pour essentiellement presque rien en retour car c’est notre passion et notre dévouement qui tous nous mobilisent. J’essaie de faire en sorte qu’un homme et une femme issus du milieu local soient présents en qualité de kiteyak, ou de gardiens du savoir, peu importe le lieu où je me trouve. J’ai également à ma disposition une personne interne, en général, un enseignant bénévole qui veut apprendre à enseigner le cri et habituellement quelques jeunes responsables de la coupe du bois, de l’approvisionnement en eau et du nettoyage du camp. Le camp lui-même se compose de 15 participants. Dans le passé, les participants venaient de partout au Canada et on peut donc parler de croissance à plusieurs volets. Au tout début, c’est au sein de ma collectivité d’origine de Sturgeon Lake que le camp avait lieu, mais depuis, grâce à la présence d’autres observateurs piqués par la curiosité, d’autres les ont imités. J’ai compris que je sensibiliserais toute la province en organisant ces camps dans différentes collectivités autochtones des Premières Nations pour que leurs membres s’y intéressent en voyant faire les apprenants et qu’ils désirent à leur tour apprendre à parler le cri.

Comme je disais, j’œuvre en qualité d’académicienne pour la revitalisation de la langue depuis un moment et la raison pour laquelle cette activité devrait obtenir la priorité est qu’elle permet de refléter qui nous sommes. Je me rappelle l’adage selon lequel notre langue est ce qui nous insuffle notre identité. Nos langues sont vivantes. Ce sont elles qui nous mettent en relation avec l’environnement, qui nous permettent d’établir des rapports avec qui nous sommes. Elles tissent des liens entre nous et nos réseaux de parenté. Toutes nos relations sont ainsi imbriquées les unes dans les autres. Si nous ne parlons pas notre langue, il me semble que nous perdons le sentiment d’appartenance. Notre fierté en ce qui a trait à nos origines et à l’importance de notre peuple ne peut être la même. Mais il nous faut de nouveau affirmer qu’en raison des pensionnats indiens, notre bien-être mental a été mis à rude épreuve. Je pense que nous subissons les conséquences de la perte de notre langue maternelle ou de nos langues autochtones. Nous ignorons où se trouve notre place dans ce monde. Mais nous n’avons jamais accepté de nous dessaisir des langues autochtones qui sont nôtres, ni de notre identité. C’est la vérité toute nue dans toute notre identité et notre vulnérabilité, mais je crois qu’il nous faut en prendre conscience si nous voulons retrouver la pleine possession de nos moyens. Et cela me donne un regain d’énergie. Je suis si heureuse. Je deviens si passionnée. Cela donne tant de sens à ma vie. J’éprouve tant de fierté et de détermination que je veux le partager. Je veux être une source d’inspiration pour que d’autres personnes continuent à apprendre à parler leur langue maternelle, soit le nehiyaw, le dené ou le dakota. Toutes nos langues sont importantes. Chaque personne doit trouver pour elle-même où elle se situe par rapport à sa langue.

Ce que j’espère qu’il adviendra de cette réunion en matière de langues, c’est qu’elle évolue pour devenir une grande fête populaire réunissant des gens qui parlent différents dialectes et viennent des quatre coins du monde. Je souhaite que des gens habitant le continent entier viennent et conversent dans leur langue, qu’ils se montrent pareillement déterminés, fiers, tenaces et passionnés pour la conservation de leur langue et qu’ils résistent à la tentation d’adopter l’anglais comme première langue. Lorsque vous parlez votre langue maternelle, vous comprenez le concept de souveraineté ainsi que les traités, et vous connaissez vos droits inhérents de base en tant que Nehiyaw. Les langues autochtones font également de nous des êtres forts et solides. En ce qui concerne la collectivité, n’est-il pas vrai que même mes mentors langagiers voient se profiler nos rêves sur une plus grande trame? Si vous pouvons tous raffermir ce lien et renforcer notre langue, nous serons encore mieux établis en tant que nation. La langue, c’est ce qui construit la nation.

 

Voir la biographie et la transcription du conférencier