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Baladodiffusion : Les voix du terrain 002 - Expériences en matière d’accouchement dans les collectivités nordiques et éloignées des Premières Nations

juin 2017

Un séries baladodiffusion : Les voix du terrain
Un séries baladodiffusion :
Les voix du terrain

Les voix du terrain

Bienvenue aux Les voix du terrain, un balado produit par le Centre de la collaboration nationale de la santé autochtone (CCNSA) qui met l’accent sur la recherche innovante et les initiatives communautaires promouvant la santé et le bien-être des peuples des Premières Nations, des Inuits et des Métis au Canada.

Épisode 2 : Expériences en matière d’accouchement dans les collectivités nordiques et éloignées des Premières Nations

Cet épisode fournit un aperçu du projet de recherche communautaire en cours qui porte sur les expériences entourant l’accouchement que vivent les femmes des Premières Nations de la nation crie de Norway House du nord du Manitoba. Le projet, dirigé par Dre Jaime Cidro de l’Université de Winnipeg, se penche sur certaines des nombreuses implications sociales, émotionnelles, financières et culturelles auxquelles font face les femmes des Premières Nations de la nation crie de Norway House lorsqu’il leur faut quitter leur collectivité pour accoucher. Grâce à ce balado, vous entendrez comment ce projet a vu le jour, quels sujets de recherche y abordera l’auteure et pourquoi le retour des programmes de maternité et de naissance devrait être une priorité.

 

Écoutez sur SoundCloud (en anglais)

 


 

Dr. Jaime Cidro
Dre Jaime Cidro, professeure associée
au département d’anthropologie
de l’Université de Winnipeg

Bio

Dre Jaime Cidro (AN) est professeure associée au département d’anthropologie (AN) de l’Université de Winnipeg. Elle travaille dans le domaine des déterminants sociaux de la santé, y compris les aliments traditionnels, en plus de travailler dans le domaine de la santé maternelle et infantile. Elle a récemment commencé à explorer le rôle que jouent les doulas autochtones auprès des femmes des Premières Nations qui doivent se déplacer en vue de l’accouchement. Pour obtenir de plus amples renseignements sur le projet, veuillez communiquer avec Dre Jaime Cidro.

Transcription

La recherche réalisée comporte des perspectives communautaires à 360 degrés sur le retour des soins liés à l’accouchement dans une collectivité nordique et éloignée des Premières Nations. Il s’agit d’une collectivité manitobaine des Premières Nations, de la nation crie de Norway House, tout particulièrement. J’y avais déjà effectué quelques recherches et j’y avais constaté des efforts visant à y instaurer un programme en soins de maternité ou à donner accès sur place à ces services. Le directeur de la santé en poste à cette époque m’a demandé de mettre au point certains renseignements dont il pressentait la nécessité pour faire avancer les choses.

À mon avis, une seule chose a vraiment compté pour le projet, c’est qu’il est, depuis son inception, le fruit d’une intense collaboration. Nous avons profité de l’assistance du Secrétariat à la santé et au développement social des Premières Nations du Manitoba, formellement issu de l’Assemblée des chefs du Manitoba, de la clinique de sages-femmes, de la Norway House Health Division (Division de la santé de Norway House) et du Remote Residency Program (programme de résidence en milieu éloigné) de l’Université du Manitoba. Ajoutez à cela la contribution de divers autres partenaires et l’une des choses auxquelles nous tenions vraiment, soit la propriété des données et la certitude que la collectivité ayant à l’origine sollicité ce projet y aurait accès, et ce, de manière appropriée, tant pour elle que pour nous. C’est le genre de processus de négociation que nous souhaitions comme première amorce du projet, pour en assurer un bon départ, parce que tous savaient ce qui allait advenir des données. Les données, auxquelles la collectivité avait librement accès, devaient être avant tout à la disposition de celle-ci. Pour ce faire, un peu de temps a été nécessaire. Nous avons en main un accord de gestion des données, que nous avons mis au point de manière très complète. D’où notre conseil consultatif communautaire grandement impliqué, qui oriente toutes les phases du projet.

Sachant que les femmes devaient quitter leur collectivité pour accoucher, j’en ai conclu que l’expérience jugée très éprouvante pourrait avoir beaucoup de conséquences négatives pour elles. Je sais pertinemment pour l’avoir vécu moi-même que l’accouchement n’est pas uniquement une expérience physiologique, mais que beaucoup d’émotions y sont rattachées. Quitter le confort de son foyer pour accoucher, loin des siens, s’apparente pour la plupart des personnes à un très grand défi. On m’a donc demandé d’offrir des conseils et en qualité de personne ayant déjà accouché, j’ai eu l’impression ferme qu’il me fallait aider à fournir des informations utiles à la communauté.

Cela dit, le projet s’est révélé d’une assez grande envergure. Il y avait au départ un certain nombre de volets que nous désirions examiner. Le premier, et celui auquel je me suis particulièrement intéressée, concerne les expériences faites par les femmes. Que ressent une femme qui quitte sa collectivité pour aller accoucher à Winnipeg ou à Thompson? Or, nous savons que, depuis quelques années, des femmes ont accouché au sein de la collectivité. Un certain nombre de situations se présentent donc dans le contexte de l’accouchement. Nous avons voulu nous pencher sur toutes ces expériences. Nous les avons examinées sous l’angle émotionnel et financier, sans éviter la vaste gamme de problèmes liés aux soins. Nous avons également pris en considération d’autres volets, soit les perspectives des principaux fournisseurs de soins de santé avec, entre autres, les problèmes liés aux risques et aux ressources. En troisième lieu, nous avons examiné la faisabilité du rapatriement de l’accouchement dans une collectivité éloignée comme celle de Norway House. Nous en sommes donc aujourd’hui à l’étude de ce volet. Nous procédons aujourd’hui à l’examen rétrospectif des données afin d’établir avec certitude le nombre de femmes qui ne courent qu’un risque faible. En plus des trois principaux volets que nous vous avons présentés, nous avons décidé de procéder à un sondage à l’échelle communautaire, afin non seulement de tenir compte des perspectives des femmes, mais également de celles des deux sexes dans la collectivité. Le taux de participation a été si élevé que nous avons fini par introduire un quatrième volet. Nous avons l’impression que nous aurons une vision assez juste de la perception qu’ont les personnes appartenant à la collectivité, y compris les fournisseurs de soins de santé, quant aux possibilités de rapatrier les services de maternité, et aux défis et aux occasions que cela suscite.

Ce qui arrive, je crois dans un grand nombre de collectivités, c’est que dans le cadre de cérémonies passablement élaborées déployées au sein de la collectivité, beaucoup d’efforts sont consacrés à la transmission de la mémoire des gens, ce qui se traduit aussi par des gestes de reconnaissance. Mais au cours des premières étapes, ce genre d’événements à caractère cérémoniel et cette manifestation de reconnaissance semblent absents lorsque l’accouchement a lieu à l’extérieur de la collectivité. C’est donc dire que ce lien avec l’origine et l’identité s’en trouve quelque peu affecté, n’est-ce pas? Les récits passionnants de femmes nées dans la collectivité et dont les enfants y sont nés également font foi de leur sentiment d’appartenance à la terre. Je pense que lorsque les femmes doivent aller accoucher hors de leur collectivité, il se crée une rupture.

 

Voir la biographie et la transcription du conférencier